Du Sport, de l’Histoire et de la Légende

Publié le par Iban

L’Aigle, le Cobra, la hyène et le Blaireau, découvrez la fable animalière et e-sportive qui nous parle de l’Homme.

 « Dans le sport, il y a des champions et il y a des héros. Les champions gagnent parce qu'ils sont bons dans ce qu'ils font et profitent particulièrement de leurs victoires. Les héros gagnent quand on s'y attend le moins, dépassent leurs propres limites, et lorsqu'ils reçoivent leurs lauriers, ils partagent leurs victoires avec toute une nation. » Si le poète brésilien,  Augusto Branco, dit vrai, alors L’Aigle est indéniablement à classer dans la catégorie des héros.

Il est de ces instants où le sport prend son envol pour dépasser le cadre de la compétition et du divertissement pour atteindre les nues de l’Histoire. La victoire de Michel Ramos, le 1er juillet dernier restera dans les mémoires comme un de ceux-là, qui marquent une époque, qui figent dans les esprits et dans la légende la mémoire un moment historique. En réalisant la première victoire d’un coureur africain sur le jeudutour comme sur le Tour de France, L’Aigle de Clermont-Ferrand enregistrait ce qui est certainement son exploit majeur en même temps qu’il infligeait un  prophétique pied de nez aux partisans du repli sur soi. Son passage sur la ligne rejoint ainsi les quatre médailles olympiques du légendaire Jesse Owens au Jeux Olympiques de 1936 et son poing levé ceux de Tommie Smith et John Carlos lors de l’édition de 1968. Au moment même où le pays était en plein trouble. Au moment même où celui-ci s’apprête à accueillir la prochaine levée des Jeux. L’image de ce jeudutour 2024 ne fait donc plus aucun doute.

Et ce triomphe « au moment où l’on s’y attend le moins » pour reprendre les mots de Branco, on peut dire qu’on ne l’avait pas venu venir. Les dernières frasques de L’Aigle laissaient en effet planer les plus grands doutes sur sa capacité à concourir au plus haut niveau. Dernièrement, en plus des rumeurs de faillite à la suite de placements hasardeux dans le monde de l’édition, une vidéo largement relayée par les réseaux sociaux le montrant passablement éméché, soutenu par les bras de deux videurs et escorté à la sortie du Durty Old Town, établissement peu fréquentable où il a ses aises avait même laissé envisager un discret retrait de dernière minute. La silhouette que l’Aigle avait pu laisser entrevoir lors de ses sorties publiques, ne semblait pas compatible avec l’exercice du sport professionnel. Mais il est de ses physionomies à la Tyson Fury ou à la Paul Gascoigne qui échappent aux lois de la gravité. Pour quelques uns seulement, le talent le dispute au génie et se dispense de la diététique comme de l’abnégation du laborieux. Alors qu’importe cette anonyme 45ème place à plus d’une demi-heure du leader ? Alors oui, peut-être, ses jambes vieillissantes ne le porteront-elles pas jusqu’à la Promenade des Anglais. L’Aigle n’en a cure, lui qui continue à tracer son chemin entre les cimes avec trois victoires d’étapes au compteur déjà. D’ailleurs Bernard Hinault ne disait-il pas que « les coureurs auvergnats actuels n’ont pas le niveau pour jouer le classement général. Dans 10 ans, qui se souviendra de leur 4ème place ? Ils feraient mieux de chasser les étapes. » L’Aigle a donc écouté le Blaireau.

Les pages sportives peuvent parfois aussi déborder sur l’actualité judiciaire. Un autre événement agite la caravane du jeudutour : celle d’une mystérieuse intoxication qui touche l’équipe Leniaud ainsi que Yogi. Tous présentent les mêmes stigmates qui s’apparentent à une morsure de reptile et les symptômes sont identiques, à savoir un débours d’au moins 20 minutes sur la tête et une puissance maximale limitée à 25 watts. A ce jour, aucun spécialiste sérieux ne s’avance à prédire s’ils rejoindront Nice avant la fin de l’année civile. Plus grave encore, malgré les investigations menées tambour battant par le commissaire Juve, aucune piste ne se dégage pour retrouver le coupable, ce qui désole Gaoutcho. « A 50 ans, j’arrive dans mes meilleurs années de e-cycliste, je n’ai pas envie de passer à côté » nous confiait le Baroudeur de l’Extrême qui fêtait son demi-siècle ce weekend.

A l’inverse, s’il en est qui pète le feu (des enfers), c’est bien Robbie. Régénéré par chaque exécution en place publique, ce qui ne manque pas grâce à Ahcène, Deback, Papizinzin, Clara et bien d’autres, l’hyène mène les débats d’une courte tête sur Mamath. Le ricanement sardonique de celui qui rêve de supplicier le grupetto, d’écarteler le peloton et de fusilier les échappés glace le sang de ses concurrents comme celui des spectateurs médusés sur son passage.

D’un point de vue plus prosaïque, cette première semaine n’aura pas fait de différences cruciales entre les prétendants au classement général. Le Cobra, curieusement discret, est enlacé sur le porte-bagage de Yo. L’équipes Maillard et Ducher jouent le tir groupé avec 3 représentants chacune aux quinze premières places, Mail refusant systématiquement de passer le moindre relai à Lulu lors de ses tentatives à secouer le peloton. Ce dernier ne cachait pas son agacement à l’issue de l’étape de dimanche : « Je pense que Mail a peur de moi. S’il n’avait pas peur de moi, il aurait pris des relais, surtout qu’il avait un coéquipier. Chez Maillard, ils ne pensent pas à Yo et au Cobra, ils n’ont regardé que moi et pas les autres. » Chez Mail, on assumait hier cette stratégie défensive : « C’était une journée très stressante et je suis très heureux de la finir sans perdre de temps, résumait-il. D’un côté, ça aurait été mieux de relayer car Yo et Le Cobra n’étaient pas là, mais d’un autre, notre but était de ne pas perdre de temps du tout, donc c’était mieux d’attendre dans le cas présent. »

La deuxième semaine de ce jeudutour d’ores et déjà passionnant devrait clarifier la hiérarchie entre les favoris en validant ou non les stratégies de chacun.

Lulu

Grand Reporter au JDT Libéré

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http://www.jeudutour.com/2024/06/jdt-libere-l-heure-du-grand-depart.html

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L
Chronique d'une vie par procuration :<br /> On nous signale que des fake news circulent au sujet d'une supposée fin de carrière anticipée de L'aigle de Clermont-Ferrand.<br /> <br /> L'Auvergnat aurait raccroché son vélo , ce vendredi 5 juillet 2024, à l'âge de 99 ans. Personnage truculant, il a marqué de son emprunte, le monde du vélo (et pas uniquement le Jeu du Tour !) presque huit décennies durant, en tant que coureur, directeur sportif, consultant, simple suiveur ou organisateur de cyclosportives. <br /> C'est l'occasion de revenir sur l'une des plus belle saga de l'histoire de notre sport.<br /> L'aigle de Clermont-Ferrand est né, le 12 juin 1925, à Clermont-Ferrand où ses parents, fuyant Mussolini et le fascisme, se sont installés en 1923, avec leur deux enfants, Angelo (né en 1917) et Paule (née en 1921). Son père, Giovanni, né en 1893, coureur cycliste de Lugo (Émilie-Romagne), tenait une boutique de cycles qui fut incendiés par les milices. En Auvergne, il rentre chez Michelin en tant qu’ajusteur. Sa mère intègre les ateliers de filature de la même entreprise. Elle décède en 1931, peu après avoir donné naissance à Marie-Rose. Son père ouvre alors son atelier de cycles, avenue Barbier-Daubrée à Clermont-Ferrand. La fratrie a donc toutes les facilités pour pratiquer le cyclisme. Pourtant, seul Angelo devient compétiteur. L'aigle préfère le rugby, qu’il pratique à l’ASM (l’Association Sportive Montferrandaise)…<br /> <br /> En travaillant au magasin, il apprend la mécanique. « Pendant la guerre, je me suis mis à la compétition » précise-t-il. Et suivant les traces de son grand frère, se met – sérieusement – au vélo. Il prend sa première licence en 1943, à l’Amicale Cycliste Montferrandaise. Arrêté par la milice, en 1944, accusé d’aider la résistance. Emprisonné un mois durant, il sort au moment de la libération et retourne travailler avec son père. Mécanicien hors pair, il sait détecter et analyser tous les bruits du vélo. « Durant ma carrière pro, cela m’a bien aidé. »<br /> Sur les courses cyclistes, il remporte de nombreux succès et multiplie les places d’honneur. Cela le mène jusqu’au “Premier pas Dunlop” 1943, où il bat un certain Louison Bobet, qui, plus tard sera son coéquipier, en équipe de France. C’est d’ailleurs ce dernier qui, à force de le voir attaquer avec une telle aisance en montagne , lui donne le surnom : “L'aigle de Clermont-Ferrand ”.<br /> Il passe pro chez Métropole en 1946, remportant, d’emblée une série de Grand Prix cyclistes.<br /> <br /> En 1951, il termine second du Tour (derrière le Suisse Hugo Koblet) et Meilleur Grimpeur, mais pourtant, il accepte durant les trois éditions suivantes du Tour, de servir Louison Bobet (vainqueur en 1953, 1954 et 1955). Comme il accepte, en 1952 de servir Fausto Coppi sur le Giro, en rejoignant, comme c’était possible à l’époque, la formation Bianchi. Le Campionissimo ramènent le maillot rose et L'aigle devient meilleur grimpeur. C’est le début d’un grande histoire d’amitié, à peine ternie par deux approches différentes du métier. Autant l’Italien pose les bases d’un entraînement rigoureux, autant le Français est un joyeux épicurien… Cette amitié se terminera le 2 janvier 1960, avec la mort de Coppi, des suites d’une malaria que les duettistes ont ramené de Haute-Volta (l’actuel Burkina Faso)…<br /> <br /> L'auvergnat pourra se targuer d’avoir porté le maillot de leader, sur chacun des trois grands tours !<br /> En 1958, suite à la victoire de Jacques Anquetil, sur le Tour 1957, l'aigle se voit contraint de rejoindre l’équipe du Centre. Jouant sa carte personnelle, il termine 3e, laissant filer “L’Ange qui aimait la pluie”, le Luxembourgeois Charly Gaul (maillot jaune) et l’Italien Vito Favero. C’est son dernier fait d’armes sur le Tour ?<br /> En 1954, il lance sa propre équipe, Saint-Raphaël, avec ses propres vélo.<br /> <br /> Il devient alors directeur sportif de Jacques Anquetil, qu’il va “diriger” durant toute sa carrière. « Si Jacques n’était pas vraiment favorable à mon arrivée en tant que Directeur Sportif de son équipe, nous avons bâti une relation de confiance, qui dépassait le cadre du cyclisme. »<br /> <br /> Les deux hommes ont beaucoup travaillé le contre-la-montre, en étudiant les positions et le poids ou en jetant, empiriquement, quelques bases d’aérodynamique. « Il fut le premier coureur cycliste à porter une combinaison de soie, sur la route ! »<br /> En 1977, L'Aigle dirige la dernière saison d’Eddy Merckx, le Canibale et demeure directeur sportif jusqu’à la fin de la saison 1986. C’est en effet, cette année-là qu’il prend en main l’équipe Café de Colombia Varta, participant à l’éclosion de toute une génération de coureurs colombiens.<br /> <br /> Souvent présent sur les courses, notamment sur le Tour de France et sur les épreuves auvergnates, il n’a jamais rechigner à donner son avis – éclairé – sur le sport cycliste. Il a d’ailleurs signé de nombreux articles, notamment dans les pages du J.D.T libéré. Il officia également comme patron de bar et restaurateur à Clermont-Ferrand. <br /> Certaines mauvaises langues disent de lui qu'il vivrait dans un EPHAD, afin de préparer son dernier challenge, celui de battre le record de l’heure des plus de 100 ans…<br /> <br /> (hommage à Raphaël Geminiani)
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T
The snake attend le soleil pour s'élever vers les sommets....il est là, dormant, patient et sera impitoyable lors de sa prochaine attaque.....
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